/* Pinterest */ A côté de soi - chapitre 23 - Anne-Lise Bouchut

A côté de soi – chapitre 23

Août 10, 2023

Mathilde est assise sur le petit banc devant la maison pirate. Un peu comme un lézard, elle essaye d’attraper la chaleur du mur. Elle voit Romain s’avancer avec deux autres personnes. Au milieu de la plage, le trio s’arrête et discute. Romain se dirige vers elle pendant que ses compagnons poussent un bateau à l’eau. À contre-jour, elle a l’impression que le Principe d’incertitude a grossi. Romain semble toutefois le manier avec beaucoup moins de précautions qu’il ne l’a pu faire jusqu’alors. Arrivée à sa hauteur, Mathilde s’aperçoit que la toile a pris place dans un tube en plastique semblable à ceux utilisés par les architectes pour transporter leurs plans par vent et marée. Max l’a donné à Romain lorsqu’il hésitait à partir faire un tour en mer avec les autres habitants de l’île à cause de son précieux bagage. Il lui avait bien proposé de le garder dans son auberge le temps de la croisière. Mais Romain, dans une pirouette habile, avait refusé en expliquant que Mathilde serait tellement enthousiasmée à l’idée de pouvoir peindre au beau milieu des vagues.

Un canot aux voiles jaunes et bleues est prêt. Mathilde hésite à embarquer. Il reste encore plusieurs heures avant que le bateau ne revienne les chercher. Sur le banc, le temps risque de paraitre vraiment long.

  • À bord ! On largue les amarres !

C’est une femme d’une soixantaine d’années qui prend le rôle du capitaine. Le teint hâlé, les rides creusées par les embruns et le regard pétillant d’excitation, elle tend la main à Mathilde pour l’inciter à venir à bord. Pendant ce temps, un homme dont les traits peuvent laisser à penser qu’ils sont de la même famille s’active à hisser les voiles. Il s’installe à la barre et d’un geste indique à Romain et Mathilde de prendre place bien au milieu. Il tire sur un bout pour que les voiles résistent au vent, le bateau se met doucement à prendre la direction du chenal.

Les deux marins à présent habitent Chausey à l’année : lui a le rôle de gardien du phare, elle s’occupe de la ferme ou plus exactement du bâtiment de ferme. Les animaux tout comme la totalité des habitants ont quitté l’île à la fin des années 60 pour s’installer à Granville et enfin avoir accès à quelques conforts. René et Francine sont eux venus s’installer à demeure il y a maintenant plus de 10 ans. Enfants, ils venaient passer leurs étés chez leurs cousins respectifs. Ils se sont connus en défendant le fort des attaques des Anglais à l’aide d’épées confectionnées avec du bois flotté. Ils ont dû rendre les armes à l’âge adulte pour devenir, lui, commercial dans la grande distribution et, elle, juriste. Un licenciement et un burn-out les ont amenés à reprendre les boucliers et guetter du phare toute tentative d’invasion anglaise. Ils savaient bien qu’une couverture serait nécessaire pour faire admettre à leur entourage leur vie d’insulaire. C’est ainsi qu’ils sont devenus gardiens de phare et gérante de la ferme transformée en gîte d’étape.

Au milieu du chenal, Francine jette un premier casier puis un second.

  • Maintenant on croise les doigts pour le dîner de ce soir !

Le bateau continue de se faufiler entre les rochers malgré un varech piégeur. Ils décident d’accoster sur une grande plage de sable blanc. L’eau turquoise pourrait laisser croire qu’ils sont en plein milieu de l’océan Indien.

Anne-Lise

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Voilà plus de 15 ans que j’écris des histoires plus ou moins proches d’anecdotes personnelles vécues. Avec les mots, je transforme un quotidien somme toute très ordinaire en épopée digne des plus grands chevaliers.

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